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La triste injustice qu’on continue d’appeler vie. Cette vieille injustice qui force un fils à perdre son père, pour ensuite voir sa mère se démener des années durant à élever deux enfants, seule, sans amant pour l’aimer comme il faut, pour lui montrer toute la beauté qu’il y a dans son coeur batailleur. Non, je n’en suis pas revenu. On n’en revient pas, de ce genre d’endroit là. On peut juste aller ailleurs.
Cette injustice qui me fait tellement rager que ma syntaxe en souffre. Cette injustice qui doit être encore pire pour d’autres. Pas une injustice isolée. Une injustice partagée, pas équitablement, mais néanmoins partagée. Une injustice qui se moque bien de ma feuille de papier et des tous les mots que j’y ai criés. La même injustice que j’ai pris comme excuse pour faire du mal à ceux qui m’aimaient, et pour m’en faire encore plus. Cette injustice qui me sort de ma torpeur, juste pour me lancer dans la rage de l’impuissance. La rage du tireur qui fait feu sans cesse sur une cible invisible. Le malheur du tireur qui sait que son chargeur se vide lentement, et qu’il devra éventuellement passer son fusil à une autre épaule, pas une des siennes. Il va s’en aller comme tous les vrais tireurs s’en vont : à reculons, les yeux fixés sur une cible qu’on espère voir, l’instant d’une seconde, avant le noir. Juste pour nous confirmer qu’on a bien fait d’user notre doigt sur la gâchette de l’espoir.